L'évaluation des expériments pédagogiques dans le
domaine de l'éducation physique et sportive
- Textes de base -
preparé par Karl-Heinz Flechsig et Kurt Lange
AVANT-PROPOS
Les textes suivants sont un élément intégral d'un
cours qui sert a l'introduction au sujet de l'évaluation d'un programme
expérimental dans le domaine de l'EPS. C'est pourquoi on ne peut
pas les utiliser indépendemment. Ils seront accompagnés par
une série de conférences, par d'exemples pratiques, par des
discussions et par des suggestions conctructives.
Le cours devra avoir le caractère d'un "atelier": Les processus
d'apprentissage vont intercaler avec les processus de production.
C'est pourquoi les textes suivants doivent servir comme "textes
de base" qu'il faut complèter par des procès-verbaux
de l`atelier, par des examples construits et par des notes indivi-duelles.
I. EVALUATION OU INSPECTION
1. L'évaluation et l'inspection dans le domaine de l'éducation
ont quelque chose en commun, mais ils diffèrent dans d'autres aspects.
2. Voila ce qu'ils ont en commun: dans les deux cas, les observateurs
observent la réalité d'un programme, le jugent et y preparent
un rapport.
3. Mais il y a des differences remarquables:
Inspection |
Evaluation |
Les inspecteurs jugent la réalité contre les normes préscrites. |
Les évaluateurs jugent la réalité contre un modèle
scientifique de la réalité. |
Les inspecteurs contribuent a la stabilisation du système existant. |
Les évaluateurs contribuent au développement et a l'amélioration
du système. |
Les inspecteurs possèdent le pouvoir de sanctionner les aberrations. |
Les évaluateurs ont le devoir d'éclaircir les aspects
positifs et les aspects négatifs. |
En général, les inspecteurs sont situés dans un
contexte plutôt administratif. |
Les évaluateurs sont situés dans un contexte éducatif
et scientifique. |
Les inspecteurs en jugeant l'efficacité et la conformité
d'un individu le comparent avec les normes préscrites. |
Les évaluateurs en jugeant la qualité des actions d'un
individu, considèrent des actions comme interactions relatives a
l'environnement donné. |
4. Ainsi on peut conclure, que l'évaluation a une orientation
plus large que l'inspection.
5. Evaluation curriculaire c'est la collection des données comme
base de décision dans le domaine du développement et
de l'innovation du curriculum, des programmes scolaires et leur réalisation.
II. LES FONCTIONS DE L'EVALUATION DU PROGRAMME EXPERIMENTAL
1. Il faut dériver les fonctions de l'évaluation des fonctions
du programme expérimental qui sont:
-
Faisabilité du contenu programme.
-
Identification des "cas de réussite".
-
Recrutement d'un cadre innovateur.
-
Préparation de la vulgarisation du contenu programme.
-
Développement d'une infrastructure organisatoire.
2. Les fonctions de l'évaluation relatives au programme expérimental
doivent être definies sous les trois aspects suivants:
-
Est-ce que le programme expérimental fonctionne comme prévu?
En quelle mesure est-ce que la pratique de l'EPS correspond au contenu
programme en ce qui concerne la quantité et la qualité de
l'enseignement EPS dans les établissements expérimentaux?
-
Quelles sont les conditions et les raisons de la réussite et des
difficultés? Cela présuppose une analyse des données
col lectionnées par observation, par enquête et par
l'analyse du contenu des documents écrits.
-
Quelles conditions faut-il prévoir pour assurer les fonctions du
contenu programme. Comme résultat de l'analyse des données,
on peut formuler des recommandations a ce qui concerne des mesures pour
l'amélioration y compris l'analyse des arguments des participants.
III. LA NECESSITE D'UN MODELE THEORIQUE COMME BASE DE L'EVALUATION
-
Dans la recherche scientifique, on ne peut jamais saisir la réalite
entière; le chercheur doit se limiter a une analyse partielle. Pour
ne pas réduire et limiter la réalite d'une manière
arbitraire, il faut crèer un modèle de la réalite
en question.
-
Dans notre cas, la réalite en question c'est la pratique EPS comme
elle se développe dans les établissements expérimentaux.
C'est pourquoi il faut dessiner un modèle des caracteristiques de
cette pratique que nous jugeons essentiel et des relations entre ces caractéristiques.
-
Un tel modèle peut servir comme base de l'évaluation dans
le sens qu'il dirige et contrôle la collection des informations (données)
dont nous avons besoin pour pouvoir prendre des décisions.
-
Le modèle suivant offre quatre catégories des caractéristiques
qui peuvent influencer la pratique EPS. Ce qui manque c'est la définition
des caractéristiques en detail. Le résultat de ce processus
de la définition en detail (operationalisation) des caractéristiques
considérés relevant, c'est le "plan des données".
IV. LES METHODES ET LES PRINCIPES DE LA COLLECTION DES DONNEES
1. La methode la plus directe de la collection des données c'est
l'observation de ce qui se passe et la protocollation simultanée
des événéments. Une méthode indirecte c'est
l'analyse des documents (par ex: des rapports) qui, de leur part,
se basent sur l`observation de la réalité.
2. Un aspect tres important de la réalité c`est la représentation
des événéments dans la conscience de l'homme, leur
perception de la réalité, leur attitude, leur jugement, même
leur préjugé. La méthode la plus répandue pour
saisir ce qui se passe "dans la tête", c'est l'enquête par
interview ou l'enquête par questionnaire.
3. Pour faciliter l'observation, l'enquête, la protocollation
des événéments et des perceptions, on utilise de "outils",
par exemple
-
des grilles d'observation,
-
des "guides" de l'interview,
-
des formulaires pour enregistrer des faits, des expériences, des
opinions et des propos,
-
des media (audio-visuels) pour aider à la protocollation et pour
la complèter.
4. A ce qui concerne les principes de la collection des données,
il y en a quatre:
-
L'objectivité: c'est l'indépendance d'une donnée du
personnage, de celui qui observe et "mesure" les événéments
et les opinions.
-
La validité: c'est la relation positive entre les données
collectionnées et le problème, la décision en question.
-
La moralité: la collection des données doit respecter
la dignité et l'intimité de l'homme et les valeurs culturelles;
elle ne doit pas détruire la réalité afin de l'analyser.
-
La reliabilité: c'est le degré d'exactitude de la mesure;
si beaucoup de personnes mesurent le même objet plusieurs fois, l'aberration
de la mesure moyenne (theorique) doit être minime.
Les châpitres suivants vont expliquer plus en detail les méthodes
et les principes ci-mentionnés.
IVa. L'OBSERVATION
L'observateur peut avoir de differents rôles envers les événéments
qu`il observe: il peut être
-
observateur engagé et dans un rôle responsable,
-
observateur participant mais dans un rôle marginal,
-
observateur neutre.
L'avantage de l'observateur neutre, c'est le fait qu'il peut se concentrer
aux actes de l'observation sans être détourné ou distrait
par d'autres tâches. Il peut aussi faire une protocollation simultanée
et détaillée des événéments. Mais sa
"neutralité" a aussi des desavantages; elle peut l'exclure des expériences
essentielles, elle peut empêcher la communication et parfois peut
être couteuse.
L'observateur engagé et responsable, d'autre part, peut avoir
une perception distordue; en general, il est trop occupé par d'autres
tâches pour faire une protocollation simultanée. Il ne peut
préparer son procès-verbal qu'après l'action. Son
avantage: il est toujours présent et il connaît le contexte
et quelquefois il est"gratuit".
Dans chaque processus d'observation, on peut distinguer 4 phases dont
chacune représente une transformation de l`information:
-
la représentation d'un événément (directe ou
indirecte) par exemple (audio-visuel) (T1)
-
la perception de l'événément par l'observateur qui
doit être dirigée par des questions bien definies (T2)
-
le codage de la perception, c'est la tranformation en quelque sorte de
language (T3)
-
l'enregistrement de l'information encodée (T4)
Evénément |
T1 --> |
T2 --> |
T3 --> |
T4 --> |
Donnée |
A chaque stage il y a le risque d'erreurs, des erreurs de représentation
des erreurs de perception, des erreurs de codage et des erreurs d'enregistrement.
Il se comprend qu'il faut éviter ces fautes-la.
IVb. L'ANALYSE DES DOCUMENTS
Dans notre contexte, un "document" c'est chaque représentation des
objets des événéments, des opinions ou des suggestions,
par exemple des rapports en forme écrite ou enregistrés en
audio-cassette, des photos ou des manuels.
Analyser un document, c'est en produire des données. Comme dans
le cas de l'observation, il faut d'abord connaître les questions
auxquelles les données doivent répondre. Pour faciliter l'analyse
il faut definir clairement les catégories de la classification des
données. Si, par exemple, on veut analyser des rapports des professeurs
quant a leurs difficultes d'enseigner, il faut systématiser la recherche
en definissant les difficultés typiques qui peuvent apparaître.
Si l'analyse des documents couvre une grande quantité de documents
heterogènes, l'application des mêmes catégories à
chaque document offre la possibilite de faire l'addition des données
dans chaque catégorie. Cela permet une synthèse des données
provenant de plusieurs sources.
En général, le résultat d'une telle synthèse
c'est un "document secondaire" contenant un extrait systématique
de l'information contenu dans les documents originaux.
IVc. L'ENQUETE PAR INTERVIEW ET PAR QUESTIONNAIRE
Les deux formes d'ênquete ont beaucoup de choses en commun, c'est
pourquoi on peut les discuter ensemble. En plus, il y a des variations
et des modifications qui se superposent.
L'interview est le produit d'une communication systématique,
et structurée entre deux interlocuteurs. Cette communication est
bilatérale et offre la chance d'un rapprochement peu a peu, jusqu'
à ce que les deux partenaires atteignent une compréhension
mutuelle. La situation communicative du questionnaire est plus restreinte,
unilaterale et sans possibilité d'adaption. C'est pourquoi le chercheur
expérimenté ne construit jamais un questionnaire sans préparation
par une série d'interviews.
Dans l'interview et dans le questionnaire, ce sont les questions du
chercheur qui stimulent des événéments linguistiques,
c'est-a- dire des opinions, expériences et suggestions exprimées
en forme de langue. Puis, le chercheur prend le rôle d'observateur
qui enregistre les "événéments" et les transforme
en données.
Dans un projet de recherche, on compare tres souvent des données
relatives aux événéments et des données relatives
a l'interprétation de ces événéments par la
subjectivité de ceux qui répondent aux questions.
IVd. LA CONSTRUCTION DES FORMULAIRES POUR L'EVALUATION
Un formulaire, c'est une feuille de papier préparée pour
enregistrer les informations de toute sorte. Pour faciliter les processus
d'enregistrement, on prépare des catégories qui correspondent
aux différentes classes de l'information cherchée.
Le processus d'enregistrement peut être la tâche de différentes
groupes de personnes: les évaluateurs-chercheurs, les aides des
´évaluateurs, les professeurs, les élèves, les
membres de la communauté concernée etc. ...
Il se comprend que la maniere de définir les catégories
et de formuler les questions dépendent de la situation de ceux qui
doivent remplir le formulaire. C'est pourquoi les aspects de clarté,
de compréhensibilité et de l'économie doivent être
respectés dans le développement d'un formulaire. Selon le
problème qu`on veut resoudre, les questions peuvent être ou
très précises ("fermées") ou très générales
("ouvertes").
Dans l`évaluation des programmes d`experimentation pédagogique
les types suivants de formulaire peuvent jouer un rôle:
-
Les questionnaires a remplir (par les professeurs, les élèves
et les parents), sans aide d`un évaluateur.
-
Les questionnaires a remplir avec l'aide d'un évaluateur.
-
Les "guides" pour des interviews (par évaluateurs).
-
Les "grilles d`observation".
-
Le formulaire de rapport a l`usage des professeurs, des ad joints,
des conseillers et des évaluateurs.
La construction d`un formulaire demande beaucoup de soin, car l`imprécision
ou l`irrelevance des catégories résulte très souvent
à un "cimetiere de données" ou à l'augmentation considérable
du travail de celui qui transforme les réponses et les rapports
en "données".
Pour identifier plus facilement les sources de l`information, il faut
prévoir, pour chaque formulaire individuel un code.
IVe. L'UTILISATION DES MEDIA POUR LA COLLECTION DES DONNEES
Dans l`évaluation la forme la plus utilisée d'enregistrer
des informations c'est l`écriture; ou l`on utilise la langue naturelle
ou une langue artificielle (par exemple: un code en chiffres).
Il y a des cas pourtant, où il est plus à propos d`utiliser
les media audio-visuels pour conserver et enregistrer des informations.
En ce cas, on parle d`une "représentation iconique" de l'événément
(par contre la "représentation symbolique" en forme d'ecriture).
Les media les plus utilises dans le processus de l`enregistrement des
informations, ce sont:
-
la photo (en couleurs ou noir et blanc);
-
le video;
-
et la bande magnétique.
L'enregistrement audio-visuel de l'information s'offre dans les conditions
suivantes:
-
quand on veut documenter la totalité ou la complexité des
événéments;
-
quand la transformation immédiate des observations en forme symbolique
est difficile;
-
et quand on veut "reproduire" la réalité plusieurs fois pour
analyser le même document sous plusieurs aspects en série.
Il faut savoir pourtant que l'utilisation des media ne remplace pas la
transformation de l'information contenue dans les documents iconiques en
forme symbolique.
V. L'ENTRAINEMENT DES EVALUATEURS ET DE LEURS AIDES
Il y a plusieurs possibilités de se préparer a une carrière
d'évaluateur professionnel et spécialisé par des études
des sciences sociales.
En général, un projet d'evaluation c'est un travail en
équipe. L'équipe se compose non seulement par les deux ou
trois personnes chargées de la responsabilité du projet,
mais il faut intègrer dans l'équipe tous ceux qui aident
a l'évaluation; ce sont des adjoints, des conseillers et des enseignants,
peut-être même quelques élèves ou parents. L'integration
de ces groupes dans l'équipe des évaluateurs augmente leur
identification avec le projet ce qui est nécessaire pour la réussite
du projet. Ainsi, la plupart des membres de l'équipe ne sont pas
des évaluateurs professionnels. C'est pourquoi il faut les introduire
a leurs tâches par des mesures d'entraînement a court terme.
Les contributions de ces membres "non-professionnels" consistent typiquement
dans la collection des données et dans l'organisation du projet.
Pour pouvoir prendre leurs rôles effectivement, il faut qu'ils connaissent
le contexte du projet, qu'ils aient une idée claire de ce que "évaluation"
signifie et qu'ils peuvent comprendre ce que les évaluateurs spécialisés
font.
L'entraînement a court terme des membres "non-professionnels"
de l'équipe des évaluateurs doit comprendre donc les domaines
suivants:
-
Compréhension du terme "evaluation".
-
Connaissance du rôle de l'évaluation dans le cadre du programme
expérimental.
-
Connaissance des buts et des fonctions de l'évaluation.
-
Orientation générale, relative aux méthodes et aux
instruments de l'évaluation.
-
Introduction aux rôles et aux tâches particulières auxquelles
ils vont contribuer.
-
Introduction au cadre organisatoire du projet.
En particulier, il faut introduire les membres de l'équipe qui collectionnent
les données, y compris les professeurs, a l'usage des instruments
(formulaires, questionnaires) en forme écrite ou orale (ou tous
les deux).
VI. L'EVALUATION DE L'EVALUATION
Un projet d'évaluation - comme toute autre activite humaine - peut
être pauvre, moyenne ou excellente. Pour savoir la qualite de l'évaluation,
il faut l'évaluer.
En premier lieu, c'est l'équipe des évaluateurs elle-même
qui, de temps en temps, analyse, critique et juge la qualité de
son travail. C'est pourquoi il faut prévoir des périodes
ou même des conférences où cette évaluation
du projet d'évaluation puisse avoir lieu.
Pendant de telles périodes d'auto-évaluation, les participants
doivent communiquer dans un climat des solidarité qui amène
à une critique constructive qui a pour but de résoudre les
problèmes et difficultés et non pas d'identifier le coupable
ou un "bouc émissaire".
L'évaluation interne (auto-evaluation) peut être complètée
d'une évaluation externe, c'est-a dire l'évaluation par un
évaluateur expert externe. Il va sans dire qu'un tel expert doit
procéder avec discrétion et avec respect pour le travail
de l'équipe.
VII. L'ORGANISATION D'UN PROJET D'EVALUATION
Organiser un projet d'évaluation c'est l'ensemble des processus
comprenant:
-
la planification,
-
le contrôle de l'execution et
-
l'évaluation du projet de l'évaluation.
Le tableau dans la page suivante montre les étapes principales d'un
tel projet.
Comme toutes autres organisations, l'organisation d'un projet d'évaluation
doit:
-
déterminer les responsabilites,
-
calculer le budget,
-
maintenir la communication,
-
assurer le calendrier et
-
fournir l'equipement necessaire.
LES ETAPES DU PROCESSUS DE L'EVALUATION
Specification des buts de l'évaluation |
En particulier, l'analyse des documents relevants, la communication
avec les acteurs responsables et la rédaction d'un texte de base
en forme écrite. |
Définition de l'information cherchée |
En particulier, la détermination des sources, de la qualité
et quantité de l'information et du calendrier. |
Dresser le plan des données |
En particulier, la spécification du degré de la
synthèse, de la classification et des relations. |
Developpement des instruments |
En particulier, les formulaires etc. |
Instruction des collecteurs des données |
En particulier, des enseignants, des adjoints, des conseillers et des
évaluateurs.
|
Collection des donées |
En particulier, par questionnaires et par rapports y compris le dépôt
et le classement des données reçues. |
Analyse des données |
En particulier, la transformation, l'analyse statistique et l'interprétation. |
Presentation des resultats |
En particulier, la rédaction des publications rapports pour
différentes groupes des destinataires. |
Conséquences/décisions |
|
Prof. Dr. K.-H. Flechsig
Rapport de l'expert a court terme du projet germano-malgache
"Enseignement de l'éducation physique et sportive dans les établissements
d'enseignement"
JUILLET 1985
Homepage des Instituts
für Interkulturelle Didaktik, e-mail: kflechs@gwdg.de